Tandis que certains aiment étaler leurs gros coups sur les réseaux sociaux, ma nature contrarian m'invite à faire justement l'inverse. On n'apprend que peu de choses de ses meilleurs placements, si ce n'est que la méthode suivie est correcte, que le marché était favorable ou qu'on a eu le cul bordé de nouilles. Ou tout ça à la fois.

À contrario, les exemples que je vais vous présenter m'ont appris beaucoup plus que tout ce que j'ai pu lire et entendre en matière d'investissement. Voici mes quatre plus belles gamelles boursières, celles qui m'ont façonné en tant qu'investisseur.
Pourquoi partager ses échecs en investissement ?
Dans le monde de la finance, l'échec est tabou. Les influenceurs ne montrent que leurs plus-values, les gestionnaires de fonds ne parlent que de leurs succès, et les investisseurs particuliers cachent honteusement leurs pertes.
Pourtant, l'échec est le meilleur professeur. Mes quatre gamelles m'ont enseigné :
- L'importance des fondamentaux d'une entreprise
- La nécessité de couper ses pertes rapidement
- Les dangers de tomber amoureux d'un titre
- La méfiance envers les promesses trop belles
Ces leçons valent bien plus que le coût d'entrée. Alors autant que vous en profitiez sans payer le prix que j'ai payé.
Gamelle #1 : JDS Uniphase (2000) - La bulle Internet
Le contexte de l'investissement
On remonte à l'an 2000. Cela faisait trois ans que j'étais entré dans la vie « active » et je n'en pouvais déjà plus. De temps à autre je tombais sur CNBC en zappant et je voyais des titres qui explosaient à la hausse, jour après jour.
Parmi ceux-ci, JDS Uniphase était un des plus suivis des investisseurs en actions technologiques. Il battait records sur records. Le cours avait été multiplié par dix rien que sur l'année précédente (1999). C'était un peu l'équivalent de Tesla aujourd'hui.
Dans ma petite tête, ça bouillonnait. Je me mettais à imaginer ce que ça donnerait si j'investissais dans ce titre mes premières économies. Mes petits calculs allaient bon train : si JDSU continuait de la sorte je pourrais arrêter de travailler en l'espace de quelques années seulement. Je pourrais être rentier en étant encore jeune trentenaire.
Il n'y avait par ailleurs aucune raison que cela change, car tous les plus grands spécialistes qui défilaient sur CNBC le disaient : « cette fois c'est différent ».
L'achat et la chute
Alors je me suis lancé. J'ai ouvert un compte chez Direct Net (Crédit Suisse), transféré le solde de mon compte épargne et j'ai acheté JDSU. On était en août 2000.
Dans le genre mauvais timing, c'était assez fort. J'ai acheté pratiquement au plus haut, juste avant que la bulle Internet n'explose. Le titre a ensuite perdu plus de 90% de sa valeur.
Je ne me souviens plus exactement quand j'ai soldé ma position. Je sais juste que c'était beaucoup trop tard. Je sais surtout que j'ai passé un nombre incalculable de mauvaises soirées à regarder la dégringolade du cours sur CNBC ou sur Yahoo Finance. Je me rappelle aussi des théories des pseudo-gourous de la finance dotcom qui arrivaient encore à me convaincre que ça allait remonter.
Pourquoi j'en ai acheté
Franchement, à part l'appât du gain et vouloir faire comme tout le monde, je n'en ai aujourd'hui aucune idée. À vrai dire, je ne savais même pas ce que faisait JDS Uniphase. Eux non plus d'ailleurs. Personne ne le savait.
Les erreurs fatales
- Avoir acheté un titre juste parce qu'il était sous les feux des projecteurs, sans tenir compte de ses fondamentaux
- Ne pas avoir coupé mes pertes bien plus tôt
- Faire confiance à des gourous de CNBC
- Investir en situation de bulle manifeste
Les leçons apprises
Grâce à JDSU je suis devenu très méfiant par rapport aux placements à la mode et aux titres technos. Je me suis orienté vers des actions plus traditionnelles et des sociétés plus expérimentées. Je n'ai plus accordé aucun crédit aux pseudo-spécialistes qui font la une des médias. Surtout, j'ai cessé de croire au Père Noël.
Ce que je n'ai pas compris sur le moment : les fondamentaux des entreprises demeuraient malgré tout une notion très vague pour moi à l'époque. Je n'ai pas non plus compris pourquoi il fallait couper les pertes plus rapidement.
Gamelle #2 : General Electric (2000-2007) - Le piège de la qualité
Le contexte de l'investissement
Après JDS Uniphase, je me suis dit qu'il fallait changer totalement de cap. Plutôt que de miser sur des jeunes petites pousses, il me fallait miser sur des très grosses entreprises bien solides, qui ont fait leurs preuves.
Dans les années 2000, General Electric était en termes de capitalisation boursière un peu l'équivalent d'Apple aujourd'hui. C'était un immense conglomérat aux reins très solides. L'entreprise, fondée en 1892, figurait alors dans le Dow Jones Industrial Average depuis 1907 — la plus longue présence d'une entreprise dans cet indice. GE était donc le parfait opposé de JDSU.
L'illusion de la sécurité
On était à la fin de l'année 2000, le marché avait déjà commencé sa descente et je me suis dit alors que c'était l'occasion rêvée d'acquérir cette merveilleuse pépite à bon prix. Une entreprise pareille ne pourrait jamais faire faillite. Elle était tellement énorme que c'était comme acheter un fonds de placement, sans devoir payer des frais de gestion.
J'en étais tellement emballé que j'ai même embarqué un pote dans l'aventure. Je m'en suis mordu les doigts...
Je ne me souviens plus exactement quand j'ai soldé ma position. Encore une fois, c'était beaucoup trop tard, bien plus que JDSU, tant j'avais confiance en GE. Heureusement, j'ai quand même fini par m'en débarrasser peu avant la crise des subprimes. Je commençais enfin à comprendre que le titre était trop cher, même si j'avais déjà perdu près de la moitié de la somme investie.
Pourquoi j'en ai acheté
Je cherchais de la qualité. Avec GE, je semblais servi. J'ai lu un livre sur Jack Welch, PDG du conglomérat à l'époque. J'étais tombé amoureux de cette société.
Les erreurs fatales
- Avoir acheté un titre juste pour son histoire et sa renommée
- Ne pas avoir coupé mes pertes bien plus tôt
- Tomber amoureux d'un titre
- Acheter un titre trop cher par rapport à ses fondamentaux
Les leçons apprises
La qualité n'est pas tout. Certes GE ne risquait aucunement la faillite, mais l'histoire de son action m'a prouvé que la perte pouvait être tout aussi importante si l'on achète un titre trop cher. L'amour rend aveugle, même en bourse.
Ce que je n'ai pas compris sur le moment : les fondamentaux des entreprises demeuraient encore et toujours une notion vague pour moi à l'époque. Je n'avais toujours pas compris non plus l'importance de couper les pertes rapidement.
Gamelle #3 : Swissair / Sair Group (2001) - Le couteau qui tombe
Le contexte de l'investissement
À peu près en même temps que GE, et pratiquement pour les mêmes raisons, je me suis jeté sur la compagnie aérienne Swissair via le Sair Group. La compagnie aérienne helvétique figurait à l'époque parmi les meilleures entreprises aériennes au monde.
Le titre était passablement chahuté déjà depuis 1998 à cause d'une série de mauvais investissements. Au début de 2001 le titre avait déjà bien fondu, perdant plus de la moitié de sa valeur. Je me suis dit que c'était l'occasion rêvée d'acquérir ce fleuron de l'économie suisse à moindre prix.
La catastrophe
Je suis rentré autour des 200 francs l'action. Je me souviens en être sorti à 6 francs l'action... écœuré. Encore une fois, c'était évidemment beaucoup trop tard.
Swissair a fait faillite peu après. J'ai perdu 97% de mon investissement.
Pourquoi j'en ai acheté
Comme pour GE, j'étais totalement obnubilé par l'histoire et la renommée de Swissair. Il était pour moi inconcevable que cette belle entreprise pouvait faire faillite. Au contraire, je pensais même que le titre allait très nettement progresser.
Les erreurs fatales
- Avoir acheté un titre juste parce qu'il était sous les feux des projecteurs, sans tenir compte de ses fondamentaux
- Ne pas avoir coupé mes pertes bien plus tôt
- Avoir acheté un titre juste pour son histoire et sa renommée
- Tomber amoureux d'un titre
- Acheter un couteau qui tombe (essayer d'attraper une action en chute libre)
Les leçons apprises
Les compagnies aériennes ne sont jamais sûres. Elles sont régulièrement en crise à cause de facteurs exogènes comme le prix du pétrole, le terrorisme ou les virus. Ce n'est pas parce qu'une entreprise possède une longue histoire et qu'elle est grosse qu'elle ne peut pas faire faillite. J'ai commencé aussi à me méfier des titres qui dégringolent.
Ce que je n'ai pas compris sur le moment : les fondamentaux des entreprises demeuraient encore et toujours une notion vague pour moi à l'époque. Encore une fois, même si par la suite je suis devenu plus prudent par rapport aux actions en phase baissière, je ne comprenais toujours pas l'importance de couper les pertes.
Gamelle #4 : Fonds Reichmuth Matterhorn (2008) - L'affaire Madoff
Le contexte de l'investissement
Je ne me souviens plus exactement quand et comment je suis tombé pour la première fois sur un prospectus du fonds « Reichmuth Matterhorn », l'ancêtre du « Reichmuth Matterhorn + ». Après la leçon reçue avec les valeurs Internet, je recherchais un placement qui offre une belle rentabilité avec un minimum de volatilité.
Ce fonds affichait une très belle performance en toutes circonstances. Tout comme son successeur, il était considéré comme peu risqué. Le graphique du cours se résumait à une belle droite assez pentue. J'adorais ça.
La banque privée lucernoise Reichmuth & Co était l'émettrice du fonds. Tout cela me paraissait une affaire hautement sérieuse. La caractéristique majeure du Matterhorn, c'est qu'il s'agissait d'un fonds d'hedge-funds, ce qui permettait même aux simples particuliers d'accéder à ces placements alternatifs d'habitude réservés aux institutionnels.
La crise et le piège Madoff
Cela s'est relativement bien passé les premiers temps. Puis arriva la crise des subprimes. On était à l'aube de 2008. Contrairement à mes débuts où j'étais assez long à la réaction, je liquidais immédiatement toutes mes parts du Matterhorn. J'étais content de moi car cette fois j'avais retenu les leçons du passé et le fonds n'avait pratiquement pas eu le temps de baisser.
Ma joie était cependant de très courte durée. Après plusieurs jours d'attente, mon ordre était toujours en suspens. C'est comme ça avec les fonds : tu dépends de l'émetteur. Les jours passaient, la débâcle financière grandissait et l'affaire Madoff fit son apparition.
Surprise : la très sérieuse banque privée de Lucerne était touchée. Oups. Le Matterhorn en ligne de mire. Parmi les fonds dans lesquels elle était investie, quatre étaient placés chez l'escroc américain. Bien joué ! À l'époque ils parlaient de 10% de la valeur du fonds qui était impactée.
La longue liquidation
Dans les faits, c'était un peu plus compliqué que cela. La banque m'a remboursé 50% de mon placement quelque temps plus tard. Tout le reste partait en liquidation. J'ai dû attendre une dizaine d'années pour toucher les derniers ridicules versements.
Je ne sais pas au final combien j'ai laissé exactement dans l'histoire tant la procédure était compliquée et longue. Certes j'ai perdu moins qu'avec Swissair ou JDS Uniphase, mais une grosse partie de mon placement est resté inutilisable durant plusieurs années.
Pourquoi j'en ai acheté
Le Matterhorn semblait être un placement sans risque. Une espèce de super obligation à court terme du gouvernement avec une performance digne des actions.
Les erreurs fatales
- Avoir oublié qu'on dépend de l'émetteur du fonds pour le revendre
- Avoir confondu absence de volatilité avec absence de risques
- Avoir trop fait confiance à une banque suisse
Les leçons apprises
On n'est jamais aussi bien servi que par soi-même. Les fonds coûtent cher en frais de gestion et surtout on ne sait pas exactement ce qui s'y trame. Il faut se méfier des promesses de placements sans risque ou presque, même quand une banque suisse réputée est en toile de fond.
Les leçons transversales de mes quatre gamelles
En analysant rétrospectivement ces quatre échecs, plusieurs patterns communs émergent :
1. L'importance des fondamentaux
Dans trois des quatre cas (JDSU, GE, Swissair), j'ai ignoré ou mal évalué les fondamentaux de l'entreprise. J'achetais sur la base de l'histoire, de la renommée, du buzz médiatique — jamais sur la base d'une analyse financière solide.
Aujourd'hui, ma méthodologie quantitative s'appuie précisément sur des critères objectifs et mesurables. Plus d'émotions, plus de coups de cœur, plus de FOMO.
2. Couper ses pertes rapidement
Dans les quatre cas, j'ai conservé mes positions perdantes beaucoup trop longtemps. J'espérais un rebond, je me disais « ça va remonter », je rationalisais mes erreurs.
La règle d'or que j'ai fini par intégrer : quand une action perd 20% de sa valeur sans raison fondamentale valable, on coupe. Point final.
3. Ne jamais tomber amoureux d'un titre
GE et Swissair illustrent parfaitement ce piège. J'étais émotionnellement attaché à ces entreprises. Leur histoire me faisait rêver. Leur prestige me rassurait.
Résultat : j'ai gardé mes œillères bien en place pendant que le navire coulait.
4. Méfiance envers les promesses trop belles
« Cette fois c'est différent » (JDSU), « trop gros pour faire faillite » (GE, Swissair), « performance sans risque » (Matterhorn) — toutes ces promesses se sont révélées être des mensonges.
Si quelque chose semble trop beau pour être vrai, c'est probablement le cas.
5. Investir ce qu'on comprend
Pour JDSU, je ne savais même pas ce que faisait l'entreprise. Pour le Matterhorn, je ne savais pas dans quoi le fonds investissait réellement.
Aujourd'hui, ma règle est simple : si je ne peux pas expliquer en 2 minutes comment une entreprise gagne son argent, je n'investis pas.
Comment éviter ces erreurs ?
Vingt ans après ma première gamelle, voici ce que je recommande aux investisseurs qui débutent :
Avant d'acheter une action
- Analysez les fondamentaux : PER, croissance du chiffre d'affaires, niveau d'endettement, historique de dividendes
- Comprenez le business model : comment l'entreprise gagne-t-elle de l'argent ?
- Vérifiez la valorisation : le prix actuel est-il justifié par les résultats ?
- Évaluez les risques sectoriels : compagnies aériennes, retail, technologies disruptives sans profits
- Méfiez-vous du FOMO : si tout le monde en parle, c'est probablement trop tard
Une fois l'action en portefeuille
- Fixez un stop-loss mental : à -20%, vous réexaminez votre thèse d'investissement
- Ne moyennez pas à la baisse aveuglément : acheter plus d'une action qui baisse sans comprendre pourquoi aggrave les pertes
- Restez rationnel : l'action ne sait pas que vous la possédez, elle n'a aucune obligation de remonter
- Réévaluez régulièrement : les fondamentaux ont-ils changé ?
Philosophie générale
- Diversifiez : une gamelle sur 20 actions fait mal, mais ne vous ruine pas
- Investissez sur le long terme : mais pas dans des actions pourries (nuance importante !)
- Apprenez de vos erreurs : chaque perte est une leçon payante
- Restez humble : le marché vous rappellera régulièrement que vous n'êtes pas aussi malin que vous le pensiez
Questions fréquentes sur les erreurs d'investissement
Faut-il couper ses pertes systématiquement à -20% ?
Non, ce n'est pas une règle absolue. Le seuil de -20% est un signal d'alarme qui vous force à réexaminer votre thèse d'investissement. Si les fondamentaux restent solides et que la baisse est due à une panique de marché irrationnelle, vous pouvez conserver. Mais si les fondamentaux se sont détériorés, coupez sans hésiter.
Comment savoir si j'achète une action trop chère ?
Comparez le PER (Price-to-Earnings Ratio) avec la moyenne historique de l'entreprise et de son secteur. Un PER de 40-50 en période normale (hors croissance exceptionnelle) est généralement un signal d'alarme. Vérifiez aussi le Price-to-Book et le rendement du dividende par rapport aux moyennes historiques.
Est-ce une erreur d'investir dans les valeurs technologiques ?
Non, mais c'est plus risqué. Les entreprises tech peuvent créer des rendements exceptionnels, mais elles sont aussi plus volatiles et sujettes aux bulles spéculatives. Si vous investissez dans la tech, assurez-vous de comprendre le business model et diversifiez davantage qu'avec des valeurs traditionnelles.
Comment reconnaître une bulle boursière ?
Signaux typiques : valorisations déconnectées des fondamentaux, euphorie médiatique généralisée, tout le monde parle de bourse (même votre coiffeur), nouvelles métriques inventées pour justifier les prix (« cette fois c'est différent »), IPO d'entreprises non rentables à des valorisations stratosphériques.
Les grandes entreprises établies sont-elles plus sûres ?
Pas nécessairement. GE et Swissair étaient des géants « trop gros pour faire faillite ». Kodak, Nokia, Blackberry aussi. La taille et l'histoire ne protègent pas contre l'obsolescence, la mauvaise gestion ou les changements de marché. Analysez toujours les fondamentaux actuels, pas la gloire passée.
Vaut-il mieux investir dans des fonds que dans des actions individuelles ?
Les ETF indiciels diversifiés (type MSCI World) sont effectivement moins risqués que le stock-picking pour les débutants. Mais évitez les fonds actifs avec frais élevés et les fonds « exotiques » promettant performance sans risque. Mon expérience avec le Matterhorn m'a appris que même les fonds peuvent cacher des surprises désagréables.
Faut-il moyenner à la baisse quand une action chute ?
Seulement si vous avez analysé pourquoi l'action baisse et que les fondamentaux restent solides. Moyenner à la baisse sur une action dont les fondamentaux se détériorent (Swissair à 200 CHF puis 100 CHF puis 50 CHF...) transforme une perte en catastrophe. C'est jeter de l'argent dans un puits sans fond.
Comment gérer émotionnellement une grosse perte ?
Acceptez que c'est arrivé, que l'argent est perdu, et que ruminer ne le fera pas revenir. Analysez froidement ce qui s'est passé, documentez vos erreurs, tirez-en des leçons concrètes. Puis passez à autre chose. Mes quatre gamelles m'ont coûté cher, mais les leçons apprises valent bien plus que l'argent perdu.
À partir de quel pourcentage de perte faut-il s'inquiéter ?
Cela dépend du contexte. En période de crise généralisée (2008, 2020), un portefeuille diversifié peut baisser de 30-40% — c'est normal et temporaire. Mais si une action individuelle perd 20-30% alors que le marché est stable, c'est un signal d'alarme sérieux qui mérite investigation immédiate.
Les investisseurs pros font-ils aussi des erreurs ?
Absolument. Warren Buffett a perdu des milliards sur IBM et Tesco. Bill Ackman s'est planté spectaculairement sur Valeant. La différence : ils coupent leurs pertes plus vite et apprennent systématiquement de leurs erreurs. Les amateurs nient, rationalisent et répètent les mêmes erreurs.
Peut-on devenir un bon investisseur sans subir de pertes ?
Non. Les pertes sont le prix d'entrée de l'éducation boursière. L'important n'est pas d'éviter toute perte (impossible), mais de limiter leur ampleur et d'en tirer des leçons. Mes quatre gamelles m'ont transformé d'investisseur naïf en investisseur méthodique. Sans elles, je serais probablement encore en train de courir après le prochain « coup du siècle ».
Quels sont les red flags à surveiller absolument ?
Endettement croissant sans croissance du CA, rotation fréquente des dirigeants, changements comptables suspects, baisse du free cash flow, secteur en déclin structurel, dépendance à un seul client/produit, promesses marketing déconnectées des résultats financiers, et surtout : votre incapacité à expliquer simplement comment l'entreprise gagne son argent.
Faut-il investir pendant les krachs boursiers ?
Les meilleures opportunités apparaissent effectivement pendant les paniques. Mais attention : il faut distinguer krach généralisé (2008, 2020 = opportunité) et naufrage individuel (Swissair en 2001 = piège mortel). Pendant un krach, investissez dans des entreprises de qualité temporairement bradées, pas dans des entreprises pourries encore plus pourries.
Comment savoir si on tombe amoureux d'un titre ?
Signaux d'alarme : vous cherchez uniquement des infos confirmant votre thèse, vous ignorez les signaux négatifs, vous rationalisez les mauvaises nouvelles (« c'est temporaire »), vous êtes émotionnellement affecté par les fluctuations du cours, vous en parlez constamment à votre entourage. Si vous cochez plusieurs cases, vendez immédiatement.
Vaut-il mieux investir peu au début pour limiter les erreurs ?
Oui, absolument. Commencez avec des montants que vous pouvez vous permettre de perdre entièrement sans impact sur votre vie. Augmentez progressivement à mesure que vous accumulez de l'expérience et affinez votre méthodologie. J'aurais adoré perdre 500 CHF sur JDSU plutôt que toutes mes économies de trois ans.
Les échecs en investissement peuvent-ils avoir des effets positifs ?
Paradoxalement, oui. Mes quatre gamelles m'ont forcé à développer une méthodologie rigoureuse, à étudier sérieusement la finance d'entreprise, et à construire un système quantitatif discipliné. Sans ces échecs cuisants, je serais probablement resté un investisseur médiocre multipliant les erreurs toute ma vie. La douleur enseigne ce que les livres ne peuvent pas.