Les indicateurs de valorisation (3/9)

Le rendement en dividendes

La première question qui vient à l'esprit quand on commence à s'intéresser à l'investissement dans les dividendes est : combien de distributions puis-je obtenir à partir de mon achat ? Du coup, la plupart des personnes se ruent sur LE critère le plus utilisé de cette stratégie : le fameux rendement en dividendes, ou Yield en anglais, qui mesure le rapport entre les dividendes payés par action sur une année et le cours du titre. J'ai toujours mis en garde mes lecteurs sur le risque de se focaliser uniquement sur ce ratio, et plus ça va, plus je suis convaincu non seulement de son manque d'utilité, mais surtout de ses risques.

Tout comme le PER, le rendement en dividendes est un indicateur non seulement très suivi et facilement accessible, mais qui fonctionne également mieux avec les grosses entreprises. C'est logique étant donné que le dividende est une part du bénéfice. Le premier a néanmoins un avantage indéniable sur le second : il est impossible de le manipuler. C'est même le seul facteur qu'une entreprise ne peut pas falsifier car il tombe directement dans votre porte-monnaie.

Le premier problème du rendement en dividendes, c'est que cette stratégie est suivie par une très grosse masse d'investisseurs institutionnels et privés. L'approche a notamment été hyper popularisée avec les fameux Dogs of the Dow, les titres du Dow Jones qui paient les meilleurs dividendes. Certes, cette stratégie est intéressante, car elle offre une approche mécanique et contrarian, tout en se focalisant sur des sociétés solides, enfin en principe... En effet, même des grosses capitalisations du Dow Jones peuvent être en réelles difficultés. Kodak et GM faisaient partie des fameux Dogs, avant de faire faillite! Et comme la stratégie des gros rendements est hyper à la mode, elle a tendance à scier la branche sur laquelle elle est assise. Les revenus et la performance en pâtissent.

Quand on se focalise sur le rendement en dividendes, on s'expose aussi aux conséquences fiscales. Des revenus importants sont certes utiles et même nécessaires quand on recherche l'indépendance financière, mais à trop vouloir les gonfler on commence aussi à trop engraisser les caisses de l'Etat, au détriment des siennes. En Suisse en particulier, les plus-values boursières ne sont pas imposées, au contraire des dividendes. Je ne dis pas qu'il faille se concentrer sur des titres qui ne paient pas de distributions, mais plutôt choisir ceux qui offrent un revenu modéré. Dans les faits ce sont d'ailleurs ceux-ci qui offrent la possibilité de réaliser les meilleurs gains.

Enfin, et surtout, la stratégie uniquement basée sur les hauts rendements en dividendes pose un dernier gros risque, celui de la baisse des distributions, voire carrément de leur suppression. En effet, en se concentrant sur des sociétés qui paient de juteux revenus, on se focalise aussi la plupart du temps sur des entreprises en difficulté. Les dividendes sont élevés pour une bonne raison : le cours a récemment chuté parce que l'organisation rencontre des difficultés, passagères, ou non. Rien ne garantit que le dividende payé par le passé soit maintenu, car si l'entreprise a des soucis financiers, il y a de fortes chances pour que les distributions soient abaissées, ou carrément supprimées. Dans ce cas, en investissant dans ce titre, vous perdez à la fois le revenu que vous cherchiez et le capital que vous avez investi (car les cours ont une très fâcheuse tendance à subir des corrections en fonction de la politique du dividende). C'est un peu comme si vous étiez propriétaire d'un appartement, que votre locataire ne vous paie plus de loyers et qu'en plus votre bien avait perdu la moitié de sa valeur... pas très intéressant. En Juin 2008, la Bank of America (NYSE: BAC) affichait un rendement supérieur à 10%. Celui qui a acheté du BAC pour son rendement généreux s'est donc retrouvé avec un titre qui non seulement ne payait presque plus aucun dividende 9 mois plus tard, mais dont le cours a de surcroît complètement dévissé durant la même période...

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4 réflexions sur “Les indicateurs de valorisation (3/9)”

  1. Excellent article! Effectivement, le yield n’est pas tout. Zurich l’illustre très bien: le dividende tourne toujours autour des 6% et attire en masse les investisseurs qui ne se focalisent que sur le rendement. Pourtant, la performance totale est lamentable et le titre est bien plus bas qu’il y a 10 ou 15 ans.

    Exactement à l’opposé d’entreprises qui créent de la valeur et sont plus raisonnables avec leurs distributions telles que Vaudoise, Forbo ou Geberit.

  2. blank

    Je ne suis pas fan du rendement. Cela ne m’a pas traversé à l’esprit lorsque j’ai débuté en Bourse. Et heureusement.

    Toutefois, il existe des catégories d’actions spécifiques qui méritent d’analyser d’une autre façon comme les REIT, les MLP, etc.

    Enfin, je voudrais pourquoi les plus-values sont exonérées en Suisse comme en Belgique.

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