⚠️ Mise à jour novembre 2025 : Données actualisées avec Chevron sur 22 ans et retour d'expérience depuis 2020.
Vendre ses actions n'est généralement pas la voie à suivre lorsqu'on suit une stratégie de dividendes croissants. Cette approche est en effet un formidable catalyseur de revenus passifs. En plus d'être stables, les distributions découlant des rendements croissants peuvent être très importantes sur le long terme, indépendamment des fluctuations du marché.
Contexte 2020-2025 : Dans un environnement marqué par la volatilité des marchés, la remontée des taux d'intérêt et le retour d'une inflation significative après une décennie de stabilité, ces trois règles de vente conservent toute leur pertinence. Les valorisations excessives observées en 2020-2021 ont laissé place à des corrections importantes, rappelant l'importance d'une discipline de vente face aux surévaluations.
L'effet boule de neige des dividendes croissants
Prenons l'exemple de Chevron (CVX). En 2003, le titre s'échangeait à 43,50 $ et versait un dividende annuel de 1,43 $, soit un rendement de 3,29%. Fin 2024, CVX verse 6,84 $ par action. Sans achat supplémentaire, le rendement par rapport au coût d'achat (YOC - Yield on Cost) atteint désormais 15,72% ! Le titre offre en 2025 4,47% de dividendes au prix du marché, mais les actions achetées en 2003 génèrent un rendement près de quatre fois supérieur.
En 22 ans, le dividende a été multiplié par 4,8 et le rendement sur coût d'achat par 4,8 également. Voilà la puissance des dividendes croissants sur le très long terme.
On comprend dès lors l'intérêt de conserver le plus longtemps possible ses titres payeurs de dividendes croissants. Ceci reste valable à condition que le dividende continue effectivement à progresser. Les lecteurs de mon e-book, ainsi que mes fidèles lecteurs, savent qu'il existe seulement trois raisons valables de vendre un titre payeur de dividendes croissants.
Règle n°1 : Vendre lorsque les dividendes stagnent ou baissent
La première raison de vendre : le dividende est statique depuis deux années consécutives, ou a été éliminé ou réduit. Ce critère est très facile à contrôler et redoutablement efficace.
Selon Ned Davis (2010), les dividendes croissants affichent une meilleure performance que les dividendes statiques, qui eux-mêmes surperforment ceux qui diminuent ou cessent leurs distributions. Cette logique s'explique simplement : le dividende représente historiquement près de la moitié de la performance boursière totale. De plus, c'est un excellent révélateur de la santé financière d'une entreprise.

Règle n°2 : Surveiller les fondamentaux de l'entreprise
La seconde raison de vendre : les fondamentaux se sont détériorés. Cette règle découle naturellement de la première. Les dividendes étant une fraction du bénéfice et du free cash flow, si ces derniers stagnent ou baissent, les distributions suivront inexorablement.
Le contrôle est relativement simple. La plupart des sites financiers indiquent le ratio de distribution (payout ratio) des dividendes par rapport aux bénéfices. Si ce n'est pas le cas, on peut l'estimer en multipliant le rendement par le PER.
Règle générale : plus ce ratio est faible, plus le dividende est sûr. Un payout ratio d'environ 66% (2/3) est souvent considéré comme un bon compromis entre distribution généreuse et sécurité.
Règle n°3 : Vendre en cas de surévaluation manifeste
Si on pense assez souvent aux deux premiers points, on oublie souvent la troisième raison qui peut nous pousser à vendre : le titre s'est nettement surenchéri.
Quand on acquiert des dividendes croissants, on pense parfois à tort que c'est pour la vie. L'effet boule de neige des distributions croissantes peut nous faire passer à côté du fait que certaines positions se transigent à des prix irrationnels. C'est dommage, car il est possible dans cette situation d'augmenter son rendement sur coût d'achat (déjà souvent exceptionnel avec les dividendes croissants) en faisant de l'arbitrage avec d'autres titres moins onéreux.
Exemple concret d'arbitrage : l'entreprise P&GB
Prenons l'exemple de l'entreprise fictive "Proctologue & Gants bleus" (toute ressemblance avec une entreprise existante est fortuite). Cette société jouit d'une demande soutenue depuis plusieurs années et bénéficie d'excellentes perspectives grâce au vieillissement de la population.
Elle est suivie par de nombreux institutionnels et analystes. Son cours a fortement progressé depuis 2010. Les bénéfices sont en hausse constante, comme le dividende, mais ne grimpent pas aussi rapidement que le cours. Le PER a donc fortement augmenté et se trouve en situation de surchauffe.
Note : Le tableau ci-dessous présente un exemple illustratif basé sur des données historiques 2010-2019. Les chiffres sont fictifs mais représentatifs des situations de surévaluation progressive qu'on peut observer sur le marché.
Le tableau montre l'évolution du cours et des fondamentaux de P&GB depuis 2010. L'action était bon marché à l'époque, avec un PER de 15 et un rendement de près de 4%. L'investisseur a réalisé un excellent placement : le titre a doublé en cinq ans et triplé en huit ans. Son rendement par rapport au coût d'achat (YOC) a doublé en neuf ans.
Le buy & hold était clairement la bonne approche dans ce cas.
| P&GB | 2010 | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 |
|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
| Cours | 100 | 115 | 132 | 152 | 175 | 201 | 231 | 266 | 306 | 352 |
| EPS | 6.65 | 7.18 | 7.76 | 8.38 | 9.05 | 9.77 | 10.55 | 11.40 | 12.31 | 13.29 |
| PER | 15 | 16 | 17 | 18 | 19 | 21 | 22 | 23 | 25 | 26 |
| Dividende | 3.99 | 4.31 | 4.65 | 5.03 | 5.43 | 5.86 | 6.33 | 6.84 | 7.39 | 7.98 |
| Rendement | 3.99% | 3.75% | 3.52% | 3.30% | 3.10% | 2.91% | 2.74% | 2.57% | 2.41% | 2.27% |
| YOC (Buy&Hold) | 3.99% | 4.31% | 4.65% | 5.03% | 5.43% | 5.86% | 6.33% | 6.84% | 7.39% | 7.98% |
| YOC2 (Arbitrage) | — | — | — | — | — | — | 7.98% | 8.62% | 9.31% | 10.05% |
La stratégie d'arbitrage pour multiplier les revenus
Si on regarde l'évolution des valorisations des dernières années, il y a de quoi se poser des questions. Le cours se monte désormais à 26 fois les bénéfices et le rendement courant à 2,27%. Il y a pire certes, mais il y a aussi mieux.
Admettons que l'investisseur décide de se séparer de P&GB fin 2015. Il a plusieurs bonnes raisons : le PER dépasse 20 et sa position a doublé depuis l'achat. De plus, il a repéré un autre titre équivalent avec les valorisations de l'époque (rendement de près de 4%).
Grâce à la plus-value réalisée, il peut acheter une position deux fois plus importante qu'en 2010, avec un rendement identique. Résultat : un rendement par rapport au tout premier coût d'achat de quasi 8% (YOC2). Cela fait 1,65 point de pourcentage en plus que le buy & hold, et l'écart se creuse avec les années (plus de deux points après quatre ans).
Augmenter ses revenus même avec du cash
Tout cela est bien joli, mais lorsque le marché est en surchauffe, il devient difficile de trouver des titres bon marché. C'est vrai.
Dès 2017, j'ai commencé à me séparer de plusieurs titres devenus trop chers à mon goût, avec des PER non pas de 20 comme dans l'exemple ci-dessus, mais carrément de 30 pour certains. Parallèlement, je partais à la chasse aux bonnes affaires. À chaque opportunité trouvée, je vendais au moins deux titres devenus trop onéreux.
À un moment donné, j'avais tellement soldé de positions que j'en étais réduit à presque 50% de cash. Le cauchemar pour un investisseur orienté revenus. En apparence du moins...
En tirant le bilan de ma performance 2018, j'eus une surprise inattendue : les revenus issus de mes dividendes avaient explosé par rapport aux années précédentes. Jamais je n'avais touché autant de distributions en une année, alors même que ma part de cash n'avait jamais été aussi importante.
Moi, apôtre des dividendes croissants, j'avais réussi à booster mes distributions en vendant des aristocrates, le tout avec une grosse part de liquidités.
Retour d'expérience : ces règles à l'épreuve de 2020-2024
Les années 2020-2024 ont fourni un excellent terrain de test pour ces trois règles de vente. Plusieurs enseignements se dégagent de cette période mouvementée.
COVID-19 et les suspensions de dividendes (2020) : La pandémie a provoqué des suspensions ou réductions massives de dividendes dans certains secteurs (énergie, finance, voyages). Les investisseurs qui appliquaient la règle n°1 (vendre quand le dividende stagne ou baisse) ont pu préserver leur capital et se repositionner sur des secteurs plus résilients. Certains aristocrates ont montré leur vraie valeur en maintenant, voire augmentant leurs distributions malgré la crise.
Période d'euphorie 2020-2021 : La reprise post-COVID s'est accompagnée de valorisations excessives sur de nombreux aristocrates, avec des PER dépassant largement les 25-30. La règle n°3 (vendre en cas de surévaluation) a permis d'arbitrer vers des titres décotés ou de constituer des réserves de liquidités en attendant de meilleures opportunités.
Retour de l'inflation 2022-2023 : Après une décennie de taux ultra-bas, la remontée brutale de l'inflation et des taux d'intérêt a provoqué des corrections importantes. Les entreprises aux fondamentaux solides (règle n°2) ont mieux résisté et ont pu continuer d'augmenter leurs dividendes même dans cet environnement difficile. Les secteurs exposés aux matières premières et à l'énergie ont particulièrement brillé.
Conclusion : les 3 règles d'or pour vendre ses actions
L'expérience accumulée depuis 2010, et particulièrement confirmée par les turbulences de 2020-2025, rappelle que même si la stratégie des dividendes croissants est avant tout de type buy & hold, et qu'elle doit le rester, certaines situations justifient impérativement la vente d'actions.
Les trois règles d'or pour savoir quand vendre :
- Les fondamentaux de la société se sont détériorés au point de menacer les dividendes futurs
- Le dividende est statique depuis deux années consécutives, ou a été éliminé ou réduit
- Le titre s'est nettement surenchéri et il est possible d'arbitrer avec d'autres payeurs de dividendes croissants
L'objectif n'est pas de faire du trading actif, mais d'optimiser le rendement sur coût d'achat en réallouant intelligemment le capital vers des opportunités mieux valorisées. Cette approche disciplinée peut augmenter significativement vos revenus passifs sur le long terme, comme l'ont démontré les périodes de surévaluation (2017-2018, 2020-2021) suivies de corrections (2022-2023).
Dans un monde où les valorisations fluctuent fortement et où les cycles se succèdent, ces trois règles simples constituent un garde-fou efficace pour protéger et optimiser son portefeuille de dividendes croissants.
Questions fréquentes
Quand faut-il vendre une action à dividendes croissants ?
Il existe trois situations : dividende stagnant 2 ans ou coupé, fondamentaux détériorés, ou surévaluation excessive (PER > 25-30).
Peut-on augmenter ses revenus passifs en vendant ses aristocrates ?
Oui, via l'arbitrage vers des titres mieux valorisés. L'exemple P&GB montre un gain de 1,65 point de YOC en arbitrant à PER 21 vers PER 15.
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Question très intéressante en effet de déterminer la meilleure chose à faire avec un titre qui a fortement grimpé et dont le yield actuel devient pâlichon. Je suis plutôt un investisseur buy and hold, mais comme toi je fais des exceptions.
Dans le cas de figure où la hausse du titre est plus que proportionnelle à l’amélioration des fondamentaux (autrement dit elle est principalement due à une expansion du PER), se séparer de l’action est parfois la meilleure des stratégies. En remplaçant ce titre par un autre moins cher et offrant un dividende plus généreux, on dope son revenu passif sans avoir à recourir à de nouveaux fonds. Le pied pour atteindre plus rapidement son objectif d’indépendance financière 🙂
Qu’en est-il du marché suisse à ton avis ? Il semble littéralement dopé à court/moyen terme par les taux négatifs. Les PER explosent parce que les investisseurs n’ont guère d’autre choix dans notre pays que de placer leur argent en actions. Le SMI a ainsi touché pour la première fois les 10’000 points. Par contre j’ai beaucoup d’interrogations sur les incidences à plus long terme de ce phénomène : problèmes sur le rendement des caisses de retraite (encore elles 🙂 !) et donc le niveau de vie des retraités, risques pour les endettés/propriétaires lorsque les taux remonteront et de manière générale fin de l’argent facile pour les entreprises. La consommation et la production vont en pâtir et j’ai le sentiment que le balancier va virer fortement dans l’autre sens, avec une forte correction à la baisse des indices suisses des actions. Qu’en dis-tu ?
Rejoindre la discussion… Bonjour Jérôme,
Merci pour ce rappel et pour votre liste des Super Aristocrates internationaux.
Avez vous une liste, ou savez vous ou l’on peut en trouver une, des entreprises européennes qui pourraient être concernées ? Peut être pas des 40+, mais peut être au moins de 10 ou 15+ qui nous donnerait des pistes intéressantes ?
Hello Patrick,
Quelque chose comme ça (10 ans et plus)?
Symbol Exchange Company
SSE LON SSE PLC
IMB LON Imperial Brands PLC
BATS LON BRITISH AMERICAN TOBACCO PLC ADS Common Stock
WPP LON WPP PLC
SEBA FRA Skandinaviska Enskilda Banken AB Class A
ENG BME Enagas SA
MCRO LON Micro Focus International plc
REE BME Red Electrica Corporacion SA
SESG EPA SES SA
BA LON BAE Systems plc
SAN EPA Sanofi SA
GBLB EBR Groep Brussel Lambert NV
PRU LON Prudential plc
ROG SWX Roche Holding Ltd. Genussscheine
NOVN SWX Novartis AG
UNA AMS Unilever NV Dutch Certificates
PPB LON Paddy Power Betfair PLC
JMAT LON Johnson Matthey PLC
NESN SWX Nestle SA
SGE LON The Sage Group plc
COLO-B CPH Coloplast A/S
NOVO-B CPH Novo Nordisk A/S
DGE LON Diageo plc
CPG LON Compass Group plc
WTB LON Whitbread plc
ABF LON Associated British Foods plc
BNZL LON Bunzl plc
AHT LON Ashtead Group plc
WKL AMS Wolters Kluwer
FME FRA Fresenius Medical Care AG & Co. KGaA
OR EPA L’Oreal SA
FRE FRA Fresenius SE & Co KGaA
ITRK LON Intertek Group plc
NZYM-B CPH Novozymes A/S
LISP SWX Chocoladefabriken Lindt & Spruengli AG Participation
EL EPA EssilorLuxottica SA
RMS EPA Hermes International SCA
KYGA LON Kerry Group PLC
Le site http://dividendchampions.uk/Default est pas mal foutu. Avec ce lien tu tombes sur la page UK, mais en bas de la page tu trouves les liens directs vers d’autres pays / devises (dont EUR).
Oui, le marché suisse est devenu horriblement cher. Je dois avouer que je suis heureux d’être forcé de vendre des actions actuellement afin de couvrir les frais liés à l’achat de mon appart. Le hasard fait plutôt bien les choses pour moi: les actions sont hors de prix et les taux hypothécaires anémiques.
Il n’y a en effet actuellement pas d’alternative valable aux actions, mais ce phénomène n’est pas spécifique à la Suisse. Qui veut acheter des obligations à des conditions aussi mauvaises? Qui veut payer des taux négatifs sur son cash?
Par contre, ce n’est pas parce que le marché des actions est à ce point survalorisé qu’un crash est imminent. Je pense comme toi que les rendements à moyen terme seront inférieurs à leur moyenne historique, mais impossible de savoir le moment ou l’ampleur d’une telle correction.
C’est vrai que le timing est bon, utiliser les plus-values boursières comme fonds propres dans l’immobilier. Double effet kiss cool.
Effectivement nul ne sait quand la correction aura lieu. Mais elle aura lieu. Cela me rappelle les warnings de W. Buffett dès la deuxième partie des années ’90, alors que tout le monde s’emballait sur les dotcom. Il avait raison, mais le marché a mis des années pour le reconnaître. Par contre, quand ça a vraiment lieu, plus cela a duré, plus la correction est violente. Encore une fois, tout est question de prix.