Dernière mise à jour : décembre 2025
Hormel Foods Corporation se trouve aujourd'hui à un carrefour stratégique. Ce géant américain de l'agroalimentaire, qui peut se targuer d'un palmarès exceptionnel de 60 années consécutives d'augmentations de dividende, traverse une période difficile qui remet en question sa capacité à maintenir ce statut de Dividend King. Avec une action qui a chuté de 27.6% sur l'année écoulée et un payout ratio alarmant de 83%, les investisseurs doivent peser soigneusement les risques et les opportunités.

Un patrimoine de marques centenaire
Fondée en 1891 par George A. Hormel dans le Minnesota, l'entreprise a d'abord porté le nom de George A. Hormel & Company avant d'adopter sa dénomination actuelle en 1993. Elle s'est imposée comme l'un des leaders mondiaux de la production alimentaire, avec un chiffre d'affaires de 12.1 milliards de dollars et 20 000 employés à travers le monde.
Son portefeuille de marques comprend des noms emblématiques comme SPAM (commercialisé depuis 1926), Skippy, Planters, Jennie-O, Applegate, Columbus et Hormel Black Label. Plusieurs de ces marques occupent la première ou deuxième position dans leurs catégories respectives. Un chiffre illustre la pénétration de l'entreprise : 81% des ménages américains possèdent au moins un produit Hormel chez eux.
La structure des ventes reflète une dépendance marquée au marché américain : 62% du chiffre d'affaires provient du retail américain, 32% du foodservice et seulement 6% de l'international. La répartition produits montre que 72% des ventes concernent des produits périssables et 28% des produits de conservation.
Une valorisation attractive mais un dividende menacé
Hormel se négocie actuellement à 23.27 dollars, soit un ratio cours/bénéfices de 16.97 (TTM). Cette valorisation, inférieure à la moyenne de l'industrie (17.55), place le titre parmi les plus bas niveaux de la décennie. D'autres multiples confirment cette décote : le P/S de 1.06 et le P/FCF de 20.42 suggèrent une valorisation raisonnable par rapport au secteur.
Le rendement du dividende atteint 5.03%, un niveau historiquement élevé pour Hormel. Ce rendement attractif s'explique toutefois par la chute brutale du cours de l'action, et non par une augmentation substantielle des distributions. En novembre 2025, le conseil d'administration n'a approuvé qu'une hausse symbolique de 1%, portant le dividende annualisé à 1.17 dollar. Cette 60ème augmentation consécutive marque un ralentissement net par rapport aux années précédentes, où la croissance annuelle moyenne sur 5 ans s'établissait à 6.11%.
Le véritable signal d'alarme provient du payout ratio de 83.32%, qui s'éloigne dangereusement du seuil de viabilité. Un ratio si élevé laisse peu de marge de manœuvre en cas de coup dur et pourrait forcer la direction à choisir entre maintenir le statut de Dividend King ou préserver la santé financière de l'entreprise. Pour comparaison, la moyenne de l'industrie se situe à 59.29%.
Performance catastrophique et défis structurels
L'action Hormel a enregistré une performance désastreuse avec une baisse de 27.6% sur 52 semaines et de 24.23% sur 26 semaines. Cette chute reflète les multiples défis auxquels fait face l'entreprise.
Les volumes de vente ont reculé de 2.3 à 2.4% en moyenne sur les deux dernières années, un signal particulièrement inquiétant pour une entreprise de biens de consommation de base. Cette érosion suggère que les consommateurs se détournent des produits de la marque, possiblement vers des alternatives moins chères.
L'inflation des coûts constitue le principal frein à la rentabilité. Les prix du porc et du bœuf ont augmenté bien plus rapidement qu'anticipé, créant une pression insoutenable sur les marges. En août 2025, la direction a dû réviser drastiquement ses prévisions de bénéfices pour l'exercice fiscal 2025, passant d'une fourchette de 1.49 à 1.59 dollar par action à 1.33 à 1.35 dollar. Cette annonce a provoqué une chute de 13% du titre en une seule séance.
L'activité dinde, commercialisée sous la marque Jennie-O, souffre des épidémies de grippe aviaire qui perturbent régulièrement la production et affectent les prix du marché. Le segment international peine également, particulièrement en Chine où les ventes restent molles.
La perturbation de production à l'usine Planters de Suffolk en Virginie a aggravé la situation, limitant la capacité de l'entreprise à répondre à la demande pour son portefeuille de snacks aux noix. Cette disruption s'est étendue sur plusieurs trimestres et a pesé sur les résultats.
Des fondamentaux financiers solides malgré tout
Malgré ces difficultés opérationnelles, Hormel maintient une structure financière saine. Le ratio d'endettement (dette/capitaux propres) de 0.35 reste bien inférieur à la moyenne sectorielle de 0.52. La couverture des intérêts est excellente à 13.54 fois, démontrant une capacité largement suffisante à honorer ses obligations financières.
Le score Altman Z de 3.53 place l'entreprise dans la zone de sécurité, écartant tout risque de faillite à court terme. Le score Piotroski F de 6 sur 9 indique une santé financière correcte, bien que perfectible.
Les marges demeurent néanmoins préoccupantes. La marge brute de 18.51% (TTM) reste inférieure à la moyenne de l'industrie (26.57%), tandis que la marge opérationnelle de 8.02% et la marge nette de 6.26% reflètent une compression continue des profits. Le ROE de 9.46%, en forte baisse par rapport aux 18% historiques mentionnés dans les analyses précédentes, témoigne d'une érosion de la rentabilité des capitaux propres.
La croissance du chiffre d'affaires stagne à 0.65% (TTM), et les bénéfices reculent de 3.36% sur la même période. Ces chiffres confirment les difficultés de l'entreprise à générer de la croissance dans un environnement hautement compétitif.
Le programme Transform & Modernize : une lueur d'espoir
Face à ces défis, Hormel a lancé son initiative Transform & Modernize (T&M) visant à moderniser sa chaîne d'approvisionnement, réduire la complexité de son portefeuille, investir dans les données et la technologie, et améliorer les processus. Le programme a généré 75 millions de dollars d'économies en 2024, et la direction anticipe des bénéfices supplémentaires de 100 à 150 millions de dollars pour l'exercice 2025.
Ces économies, bien que substantielles, ne suffisent pas encore à compenser intégralement la hausse des coûts d'intrants. La direction a souligné que le redressement des marges ne se concrétiserait pleinement qu'en 2026, lorsque les augmentations de prix auront pu être répercutées sur les détaillants.
L'entreprise continue d'investir dans sa croissance avec des dépenses en capital prévues entre 275 et 300 millions de dollars en 2025, notamment pour développer ses capacités de production pour les produits Hormel Fire Braised et Applegate.
Un beta quasi nul dans la tempête
Avec un beta de seulement 0.02 sur un an, Hormel se positionne comme une valeur défensive par excellence. Cette absence de corrélation avec les mouvements du marché explique en partie pourquoi le titre n'a pas profité de la hausse générale du S&P 500 en 2025. La volatilité annuelle de 25.75% reste toutefois élevée pour une entreprise de biens de consommation de base, reflétant l'incertitude des investisseurs quant à l'avenir de l'entreprise.
Verdict : Hold pour les actionnaires existants, prudence pour les nouveaux entrants
Hormel Foods se trouve dans une situation délicate. D'un côté, le titre offre un rendement attractif de 5%, une valorisation décotée et 60 années d'augmentations consécutives de dividende. De l'autre, le payout ratio de 83% laisse planer un doute sérieux sur la pérennité de ces augmentations, et les perspectives de redressement des marges ne sont pas attendues avant 2026.
Pour les actionnaires de longue date qui détiennent le titre depuis plusieurs années, la stratégie du hold reste pertinente. Les dividendes continuent d'être versés, la dette est maîtrisée, et le programme Transform & Modernize devrait porter ses fruits à moyen terme. Le risque d'une coupe du dividende existe mais reste modéré à court terme compte tenu de l'engagement quasi sacré de la direction à préserver le statut de Dividend King.
Pour les nouveaux investisseurs en revanche, la prudence s'impose. Le titre présente des caractéristiques de value trap : un rendement élevé qui masque des fondamentaux en détérioration. Une amélioration des marges et des volumes serait nécessaire pour envisager un achat à ces niveaux.
Hormel demeure une entreprise de qualité avec des marques puissantes et une position dominante sur ses marchés. Mais les investisseurs doivent reconnaître que l'entreprise traverse l'une des périodes les plus difficiles de son histoire récente, et que la route vers le redressement sera probablement longue et semée d'embûches.
FAQ
Combien d'années consécutives Hormel Foods a-t-elle augmenté son dividende ?
Hormel Foods a augmenté son dividende pendant 60 années consécutives, ce qui en fait un Dividend King. La dernière augmentation, annoncée en novembre 2025, n'était toutefois que de 1%, portant le dividende annualisé à 1.17 dollar par action.
Le dividende d'Hormel Foods est-il en danger ?
Le payout ratio de 83.32% indique une marge de manœuvre limitée. Bien que le dividende semble maintenu à court terme, toute nouvelle détérioration des bénéfices pourrait forcer la direction à choisir entre réduire le dividende ou compromettre la santé financière de l'entreprise. Les résultats de 2026 seront déterminants.
Pourquoi l'action Hormel a-t-elle chuté de 27% en un an ?
La baisse s'explique par plusieurs facteurs : volumes de vente en déclin, inflation des coûts de matières premières (porc et bœuf), problèmes dans l'activité dinde liés à la grippe aviaire, disruption de production chez Planters, et révision à la baisse des guidances de bénéfices en août 2025.
Hormel Foods est-elle une bonne opportunité d'achat actuellement ?
Le titre se négocie près de ses plus bas de 10 ans avec une valorisation attractive et un rendement de 5%. Toutefois, les défis opérationnels et le payout ratio élevé en font davantage un "value trap" potentiel qu'une vraie opportunité. Les investisseurs prudents devraient attendre des signes concrets d'amélioration des marges et des volumes avant d'initier une position.
Qu'est-ce que le programme Transform & Modernize ?
Il s'agit d'une initiative stratégique lancée par Hormel pour moderniser sa chaîne d'approvisionnement, réduire la complexité de son portefeuille produits, investir dans les données et la technologie, et améliorer les processus. Le programme a généré 75 millions de dollars d'économies en 2024 et devrait produire 100 à 150 millions supplémentaires en 2025.
Quelles sont les marques principales d'Hormel Foods ?
Les marques phares incluent SPAM (viande précuite), Skippy (beurre d'arachide), Planters (snacks aux noix), Jennie-O (produits de dinde), Applegate (viandes naturelles), Columbus (charcuterie), Hormel Black Label (bacon), Dinty Moore (ragoûts) et Hormel Fire Braised (plats préparés). Plusieurs de ces marques détiennent la première ou deuxième position dans leurs catégories respectives.
SOURCES ET DONNÉES
Données financières
- FactSet (données TTM et ratios financiers)
Rapports d'entreprise
- Hormel Foods Corporation, communiqué de presse du 24 novembre 2025 : annonce de la 60ème augmentation consécutive du dividende
- Hormel Foods Corporation, présentation aux investisseurs du 11 novembre 2025 : convocation pour la publication des résultats Q4 fiscal 2025
Analyses sectorielles
- S&P Global, rapport sur l'indice Dividend Aristocrats (janvier 2025)
- Sure Dividend, analyse des Dividend Kings et Dividend Aristocrats (mars 2025)
Articles de presse et analyses
- Seeking Alpha : "Hormel Foods: Recent Dividend Raise, Yield At Decade Low - Bargain Or Value Trap?" (28 novembre 2025)
- Zacks Investment Research : "Hormel Foods Readies for Q4 Earnings" (décembre 2025)
- Yahoo Finance : "What to Expect From Hormel Foods' Q4 2025 Earnings Report" (octobre 2025)
- Simply Wall St : "Why Hormel Foods Is Down 13.0% After Cutting 2025 Earnings Outlook" (août 2025)
En savoir plus sur dividendes
Subscribe to get the latest posts sent to your email.
Ah oui, ça c’est vraiment du solide, on en mangerait! Le dividende vient même d’être augmenté à 0.75 cents, soit un rendement désormais de 2.2%
Heureusement qu’on peut compter sur nos dividendes pour recevoir des augmentations parce que s’il fallait attendre sur nos patrons…
Tu as bien raison, avec le salaire il faut être beaucoup plus patient qu’avec les dividendes. Tiens, d’ailleurs ça me rappelle une vieille blague:
Un monsieur qui cherche un emploi, se présente dans une entreprise :
– C’est bon, vous êtes embauché ! Vous gagnerez 1200 Euros au début, et bien davantage plus tard…
– Dans ce cas, Monsieur, je reviendrai plus tard !
Connaissais pas, mais j’ai bien noté et je viendrai plus tard également
Bonjour jerôme
Très belle société qui est chère c’est vrai mais qui est même considéré un king car plus de 50 années de dividende sans baisse. 25 ans pour les aristocrates.
Connaissez-vous Jerôme un etf suivant les aristocrates (51) ou encore mieux les kings ?(21)
C’est vrai que les sociétés américaines sont dans l’ensemble très chères, mais un etf suivant l’ensemble serait intéressant à suivre et peut-être moins cher.
Je sors un peu du cadre mais vu votre expérience j’aimerais avoir votre avis… si possible… ayant du BRK je ne pense pas m’en séparer quoiqu’il arrive mais avoir une autre opportunité supplémentaire serait intéressant..
bien amicalement
Antonio
Bonjour Antonio
Il y a NOBL chez Proshares.
Mais tout ça est trop cher en ce moment.
Passer par un ETF ne rend pas les titres moins chers, bien au contraire!
Bonjour Jerôme
Merci pour la réponse. Bien sûr qu’un ETF ne rend pas un titre moins cher mais apporte le confort de ne pas gérer 51 titres comme les aristocrates ou 21 titres si on parle des kings.
BRK bat largement le SP500 et c’est très bien car en ne gérant qu’une ligne c’est très accessible et possible car on ne pourrait pas avoir les 500 sociétés du SP500 en gestion.
Je pensais que des sociétés comme Vanguard avaient crée la même chose pour les kings ou aristocrates car pour un particulier avoir 51 lignes pour répliquer les aristocrates du dividende ou 21 lignes pour les kings serait très lourd en gestion alors que pour un fonds ou etf cela serait plus facile.
merci pour les articles.
amicalement
Antonio
Salut Antonio
oui c’est clair c’est le grand avantage d’un ETF : il te permet d’avoir facilement un portefeuille bien diversifié avec pas relativement peu de coûts.
J’aime bien les utiliser pour les positions minoritaires d’actifs de mon portefeuille, à savoir l’or, obligations et immobilier.
Et comme ça je peux également concentrer mes recherches surtout sur mes positions stratégiques, à savoir les actions payeuses de dividendes croissants.
Ceci étant dit les ETFs ont aussi des défauts, j’en parle ici :
https://www.dividendes.ch/2017/08/comment-diversifier-son-portefeuille-pour-se-prevenir-des-risques-de-marche-1820/
https://www.dividendes.ch/2017/08/comment-diversifier-son-portefeuille-pour-se-prevenir-des-risques-de-marche-1920/
https://www.dividendes.ch/2017/08/comment-diversifier-son-portefeuille-pour-se-prevenir-des-risques-de-marche-2020/
Vanguard propose l’ETF VIG (achievers US – 10 ans de croissance du dividende).
SPDR propose SDY (aristocrates US – 25 ans de croissance du dividende) et WDIV (achievers international – 10 ans de croissance du dividende).
Proshares propose NOBL dont nous avons déjà parlé (aristocrates US – 25 ans de croissance du dividende).
Certes parmi les ETFs ci-dessus, il y a une jolie quantité de pépites qui y figurent. Mais toutes ne sont pas aussi bonnes et la plupart sont actuellement trop chères.
Je préfère personnellement sélectionner les titres un à un, même parmi toutes ces belles choses !
Mais pour celui qui commence avec un petit portefeuille ou tout simplement qui ne veut pas se prendre trop la tête, c’est un bon compromis.